PROGRESSION SPIRALAIRE
Les notions qu’on aborde avec les élèves sont complexes. Elles demandent qu’on y revienne régulièrement.
Les élèves ont besoin de temps
Ce n’est pas en une leçon de trois quarts d’heure que les élèves parviendront à concevoir une nouvelle notion, à l’intégrer à leurs représentations déjà-là et à la maitriser au point d’en avoir un usage pertinent.
Pour les aider, il faut prévoir des rappels et des retours réguliers. Les exercices disséminés dans le temps peuvent constituer autant d’étapes dans l’élaboration cognitive des élèves. Les moments de mise en relation (voir ici la page « Structurer les acquis ») sont aussi un moyen d’expliciter des contrastes et des liens.
Mais il ne s’agit pas de répéter, d’une année à l’autre, des éléments de définition qui resteraient toujours les mêmes.
Les notions ont de multiples facettes
Les notions qu’on soumet aux élèves présentent plusieurs aspects, sémantiques, morphologiques ou syntaxiques (voir la page « Différentes perspectives sur les notions »).
De plus, la position qu’occupe tel ou tel élément linguistique dans une structure de phrase a des implications diverses et chacune peut engendrer des difficultés orthographiques ou de compréhension. Par exemple, le complément circonstanciel de phrase, à priori supprimable, peut apporter une information essentielle (on partira demain) et ne plus être supprimable dans le contexte ; il peut aussi indiquer la chronologie d’une histoire et, là aussi, n’être que difficilement supprimable (Trois heures après, un coup retentit) ; en tête de phrase, il peut entrainer une inversion du sujet (Dans ce grand ciel bleu passait un vol de cigognes)…
Il semble donc régulièrement nécessaire de consacrer plusieurs leçons à une même notion.
Prenons l’exemple du complément du nom.
La notion est abordée dans CE2-14 Petit / grand groupe du nom parmi les autres expansions du groupe nominal. Toutes sont abordées comme des ajouts qui permettent de susciter un effet sur le lecteur. Parmi elles, l’adjectif est isolé et étudié à part tandis que le complément du nom est seulement distingué par sa morphologie : « plusieurs mots » (à la différence de l’adjectif) et « avec un petit mot (une préposition) au début » (à la différence de la proposition relative qui, elle, commence très souvent par que ou qui).
En CM1, les aspects sémantiques des expansions du groupe nominal sont précisés. Dans les leçons CM1-17 Lequel est-ce ? on voit la valeur déterminative qui permet de déterminer avec précision de quel objet on parle (le chat de mon voisin). Dans la leçon CM1-18 Qui n’aime pas les chats ? il s’agit de la valeur qualificative qui reflète l’opinion ou le sentiment de celui qui parle (l’adorable bête).
Les aspects morphologiques sont revus dans la leçon CM1-19 Les trois types d’ajouts dans le groupe du nom.
Ce sont les aspects syntaxiques du complément du nom que déplient plusieurs leçons. Dans CM1-27 La lecture du soir sur le canapé est mis en évidence le fait qu’un complément du nom est un groupe nominal inclus à l’intérieur d’un autre groupe nominal, lui-même… l’ensemble peut fonctionner comme des poupées russes (le miaulement [du chat [de mon voisin]]) et sérieusement compliquer la compréhension comme le traitement orthographique. Le caractère supprimable est abordé dans les leçons CM1-28 Dessiner ce qu’on a compris et CM1-32 Faire grossir/maigrir une phrase. Dans la leçon CM1-36 Dénouer les fils, est analysée la relation entre nominalisation et complément du nom (l’auteur dénoue les fils de l’intrigue / le dénouement des fils de l’intrigue…). Enfin, en CM2 Le vol de Frédégonde montre que la nominalisation efface la distinction agent/patient et pointe l’ambigüité qui en résulte (le vol de Frédégonde : est-ce que Frédégonde a volé quelqu’un ? ou est-ce que Frédégonde a subi un vol ?).
La présence d’un complément du nom dans le groupe sujet crée une difficulté pour l’accord du verbe avec le sujet (Le départ des artistes et des comédiens laisse la place publique vide et désolée). Ce point n’est pas étudié dans une leçon spécifique, mais il est régulièrement mis en évidence dans les leçons et dans les exercices régulièrement proposés.
Ainsi, à partir du CM1, les élèves étudient à huit reprises les compléments du nom. Mais si l’on fait retour sur la même notion, elle est vue depuis un questionnement différent. À chaque fois, il s’agit d’explorer une nouvelle facette : les explorations successives permettent de conceptualiser la notion, les approfondissements successifs permettent de l’ancrer plus durablement.