QU’EST-CE QU’UN « EMBRAYEUR » ?

 

On appelle ainsi, à la suite de Benveniste, les mots qui ne sont interprétables qu’en relation avec la situation d’énonciation : leur sens change selon qui parle, le moment et le lieu où il parle.
Il s’agit des pronoms des personnes 1 (je), 2 (tu), 4 (nous) et 5 (vous) ; des possessifs à ces mêmes personnes ; de certains indicateurs de temps (aujourd’hui, maintenant, il y a trois jours) ou de lieu (ici, bas, juste à deux pas, à droite) ; de certains démonstratifs (ceux qu’on appelle « déictiques », qui s’accompagnent d’un geste pour montrer : celuici…). Ils permettent d’ « embrayer », d’articuler une information à la situation concrète où a lieu la prise de parole.

À ces embrayeurs, on oppose les pronoms des personnes 3 (il / elle) et 6 (ils / elles) ; les repères absolus de temps (la date), de lieu (la localisation) ; les démonstratifs quand ils renvoient à des éléments qui ont été précisés auparavant (on les appelle alors « anaphoriques » par opposition aux « déictiques »)…

À cela, on peut ajouter les contrastes dans les valeurs aspectuelles : par exemple, l’opposition entre passé composé et passé simple.

Tous ces éléments fondent l’opposition entre les énoncés ancrés dans une situation concrète de prise de parole (l’énonciation) et les énoncés qui ne le sont pas (Benveniste parle de « discours » pour les premiers et de « récit » pour les seconds).

 

En classe, il faut souvent porter attention aux embrayeurs tels que les pronoms personnels, les indicateurs de temps…

Quand on demande aux élèves de trouver si une page de récit est « en il » (si le narrateur est extérieur à l’histoire) ou s’il est « en je » (si le narrateur fait partie des personnages, si la fiction construit une prise de parole imaginaire), on leur demande de prendre en compte le jeu des pronoms.

De même, un passage en discours direct (des paroles de personnages, ou un échange de théâtre : « Je viendrai sûrement demain », me dit-elle.) s’oppose à un passage en discours indirect (les mêmes paroles redites par un autre : Elle m’avait dit qu’elle viendrait le lendemain.) par une transposition qui touche les pronoms, les formes verbales et les embrayeurs.