QUEST-CE QU’UN GROUPE SYNTAXIQUE ?

La grammaire scolaire, dans l’exercice traditionnel d’ « analyse grammaticale », voulait faire un sort à chacun des mots d’une phrase. Cela conduisait à une représentation émiettée de la phrase et, plus ennuyeux, cela empêchait de percevoir la hiérarchie des liens qui la constituent.

Pour bien comprendre la notion de groupe, on peut prendre l’exemple d’une phrase qu’on fait réduire par remplacements successifs, à la manière de la grammaire distributionnaliste (sur cette grammaire, voir Quelques jalons pour l’histoire de la grammaire) :

D’après notre exemple, on voit que la phrase est constituée d’au moins deux éléments : le sujet (de quoi on parle : elle) et le prédicat (ce qu’on en dit : travaille), auxquels s’ajoutent un troisième élément (après la récréation) et un quatrième (pour reprendre le travail) qui, eux, peuvent être supprimés sans détruire la grammaticalité de la phrase.

On voit aussi que la position de sujet est le plus souvent occupée par un ensemble stable qu’on appellera « groupe », constitué d’un déterminant et d’un nom (la classe) mais qui peut régulièrement être remplacé par un pronom personnel. Ce groupe, on l’appelle groupe nominal, car le nom y joue un rôle central : c’est lui le donneur, c’est de lui que dépend le choix de la forme (masculine ou féminine ; au singulier ou au pluriel) du déterminant.

On peut constater qu’un groupe nominal ne se trouve pas seulement en position de sujet, mais qu’il se trouve souvent ailleurs dans la phrase. Dans notre exemple, le complément de phrase après chaque récréation est aussi un groupe nominal, mais il est dit « prépositionnel » car il est constitué d’une préposition (après), d’un déterminant (chaque) et un nom (récréation).

On constate encore qu’un groupe nominal peut être plus ou moins expansé : la classe de Françoise comporte un complément (de Françoise), cette classe studieuse comporte un adjectif (studieuse). Mais un groupe nominal, expansé ou non, peut généralement être remplacé par un pronom personnel : en cas d’hésitation, c’est un moyen assez sûr pour vérifier là où commence et là où s’arrête un groupe nominal.

Le prédicat, lui, est réalisé par un verbe seul (travaille) ou par un verbe accompagné d’un ou plusieurs complément(s) (se met en rang / se range) qui lui sont étroitement liés : il est à remarquer que la présence, le nombre ou la classe grammaticale du complément ou des compléments n’est pas au libre choix de celui qui parle mais qu’il dépend du verbe. Si l’on compare
la classe se met en rang (se dispose de manière à circuler dans les couloirs)
elle se met au travail (commence à travailler)
elle se met dans les vestiaires des petits (prend place),
on mesure que le sens du verbe se mettre varie selon le complément qu’il appelle, autrement dit on voit que le choix du complément est contraint par le sens à donner au verbe, et que, réciproquement, le sens du verbe dépend pour partie du complément qui l’accompagne. Pour signifier cette solidarité entre le complément et le verbe qu’il complète, on parle de groupe verbal.
Bien sûr, il faut éviter de cantonner les groupes nominaux à la position de sujet, on en trouve régulièrement à l’intérieur du groupe verbal, précédés ou non d’une préposition.

En plus du groupe nominal, du groupe nominal prépositionnel et du groupe verbal, on peut définir d’autres groupes. Dans d’autres phrases, on peut identifier
– un groupe adjectival, constitué d’un adjectif et d’un adverbe, ou d’un adjectif et de son complément :
Jules est très studieux / le plus studieux de tous / sûr de sa force / certain de réussir / certain que l’épreuve sera facile
– un groupe adverbial constitué d’un adverbe et de l’adverbe qui en dépend :
Ça fait terriblement mal
– un groupe infinitif constitué d’un verbe à l’infinitif et de ses compléments :
Vivre sur la lune est un rêve impossible
– un groupe participe constitué d’un verbe au participe et de ses compléments : Le roi revint, riant à gorge déployée (V. Hugo)
– etc.