ÉTUDIER LES HOMOPHONES

Le français regorge d’homophones, c’est-à-dire de mots qui s’écrivent de manières différentes mais qui se prononcent avec les mêmes sons. Ce phénomène est dû pour bonne part à ce que la façon de prononcer a évolué au cours des âges alors que l’orthographe ne changeait pas. À l’oral le contexte suffit à éviter les confusions, mais à l’écrit les confusions peuvent engendrer des malentendus. Par exemple, les phrases suivantes se disent de la même manière, elles se ressemblent, mais elles ne rapportent pas la même scène, pas la même orientation du regard :
          Celle qu’il a vue était rouge de confusion.
          Celle qui l’a vu était rouge de confusion.

La plupart des homophones concernent le lexique, comme dans le cas de [vɛr] :
          vair – ver – verre – vers – vert

Le gout des mots
Les homophones occasionnent des malentendus mais ils se prêtent aussi à toutes sortes de calembours et autres jeux de mots.
On sait comment la pantoufle de Cendrillon, autrefois en vair (en précieuse fourrure d’écureuil) est devenue sous la plume espiègle de Perrault une poétique et improbable pantoufle de verre.

Mais certains des « petits mots » – comme disent les enfants –, ces mots qui manifestent au premier chef des liens syntaxiques, sont susceptibles de semblables confusions. La liste en est connue : a / à – on / ont – ou / où – est /et – sont / son – c’est / ces / sait – etc.
Ces homophones grammaticaux sont dignes d’intérêt : pour les différencier, il faut prendre en compte la structure syntaxique où ils se trouvent employés.

L’enseignement traditionnel propose souvent des substitutions : « si on peut remplacer [a] par [ave], alors c’est le verbe avoir et on ne met pas d’accent » ou encore « si on peut remplacer [sɔ̃] par [mɔ̃], alors c’est le déterminant possessif son et on ne met pas de –», etc.
On le sait, ce type de procédures est peu efficace avec les élèves. Deux faits se combinent pour en expliquer la médiocre rentabilité :
– les élèves font l’économie de la reconnaissance de la classe grammaticale et réduisent la substitution à un simple « truc » qui les dispense de comprendre les situations et les empêche d’en mémoriser peu à peu les cas de figures ;
– quand ils écrivent, il leur faut suspendre la production du flux verbal, lever le nez, appliquer le truc, trancher le dilemme orthographique, puis reprendre le fil de leurs idées.
Cela en fait une procédure longue et couteuse. De plus, le processus n’est engagé qu’en réponse à une sorte d’alerte stressante à chaque cas rencontré.

Deux autres manières de faire peuvent aider les élèves à s’appuyer sur le texte en train de s’écrire : la mise au jour de structures prototypiques et l’étude contrastée des environnements syntaxiques.

La mise au jour de structures prototypiques

L’objectif est que les élèves associent à un contexte sémantique et à une structure syntaxique un mot et non un autre. Les difficultés devraient être levées par analogie.
Souvent, au cours d’une même leçon, sont ciblés deux ou trois mots qui s’emploient dans des environnements sémantiques et syntaxiques similaires.
Le principe est celui des collectes (voir ici la page « structurer les acquis »). Les élèves prélèvent dans un corpus les occurrences du mot ciblé, puis ils observent l’environnement sémantique et syntaxique où ce mot est employé.
D’une année à l’autre on présente des structures différentes.

Voilà, par exemple, comment est abordée la préposition à :

En CE1 :

En CE2 
Période 2 :

Période 5 :

Cette approche croise l’étude au CM1 de la relation entre les verbes et leur complément d’objet direct ou indirect :

L’étude contrastée des environnements syntaxiques

Cette approche où chaque mot susceptible de confusion est observé indépendamment de son homophone est particulièrement adaptée aux classes de CE.
À partir du moment où les élèves sont un peu habitués aux arguments qui s’appuient sur les contextes, on peut proposer une étude des contrastes. À cette occasion, on constatera que beaucoup d’homophones traditionnellement étudiés sont des formes verbales (a, est, ont, sont, mets et met…).
Voici, par exemple, pour le couple a / à en CM1 :